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11 janvier 2011 2 11 /01 /janvier /2011 20:18

Liberté

 

 

LA FETE DE YENNAR, LE NOUVEL AN BERBÈRE
La mémoire retrouvée
Par : RACHID HAMATOU

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La fête de Yennar semble être dans les Aurès un début ou un prélude pour entamer plein d’activités dicté par la nature et surtout l’agriculture.

S’il y a une fête qui a pris sa revanche sur l’amnésie, l’oubli et la déculturation, c’est bien Yennar. Spécialement berbère, mais pas exclusivement berbérophone, puisque le nouvel an amazigh est célébré dans les quatre coins du pays, aussi bien dans les régions où l’on s’exprime encore en tamazight (Kabylie, Aurès, M’zab…) mais aussi dans les autres régions du pays, où la mémoire populaire n’oublie point. Yennar, Yeannayer ou encore Nayer, il s’agit de la même fête, puisque c’est la même date ou presque. Pour certains, c’est le 12 janvier, pour d’autres le 13 du même mois.
Dans l’arrière-pays de l’Aurès profond, Yennar n’a jamais été mis au placard, même s’il a perdu un peu de sa verve. Les anciens maintenaient la tradition qu’ils ont héritée des aïeuls. La renaissance culturelle qu’avait connue le Grand-Aurès depuis les années 1980, grâce au mouvement associatif, et particulièrement, le Mouvement culturel amazigh (MCA), avait permis une sorte de relance, sommes-nous tentés de dire, une mise à jour de plusieurs pratiques sociales et culturelles qui allaient vers un trépas certain.
Cependant, ce fut la fête du nouvel an berbère qui semble avoir le mieux profité de cette reviviscence, pour la simple raison que cette coutume plurimillénaire était encore vivace. Ce qui a facilité ce retour de mémoire sans grand dépoussiérage. Aussi bien dans  l’Aurès géographique, où l’usage de la langue berbère avait connu un certain recul, qu’à travers l’Aurès linguistique, où la communication au quotidien fait appel à la langue  maternelle (le chaoui), s’est maintenue, voire s’est propagée. La célébration de la fête de Yennar, bien enracinée, est restée la même dans le fond avec peut-être quelques particularités d’une région à une autre, vu la géographie, le climat, la composante humaine, quelques fois aussi, dans l’appellation (nayer, yennar ou encore amenzou n’yennayer) sans plus. Amenzou n’yennayer (le début du mois), toute la famille se mobilise pour donner un coup de balai à la maison, comme pour mettre le compteur à zéro et entamer une nouvelle année. Cette tâche de nettoyage de la maison (akham) revient aux femmes, les murs de la maison sont repeints avec une terre blanche (lous) ainsi que le revêtement du sol par un nouveau tuf.
On prend soin aussi et surtout de changer le premier galet de l’âtre (ini) en attendant de placer deux nouveaux galets, en tout, il y en a trois. La fête de Yennar semble être dans les Aurès un début ou un prélude pour entamer pleins d’activités, dicté par la nature et surtout l’agriculture. En effet, dans la région de N’Gaous, aussi bien à Tifrene qu’a Boumagar, c’est le début de la presse des olives. Dans les moulins à huile on prend soin de ne dire que de bonnes paroles, n’accepter aucun blasphème, l’outrage n’est pas toléré ce jour-là, car cela peut fâcher Dame Nature et la presse sera de mauvaise qualité. Chez les Nemamcha, dans la région de Khenchela, Yennar est l’occasion d’installer le métier à tisser (hazeta) pour entamer un nouveau tapis. Une bonne récolte et des nouveau-nés en bonne santé sont les vœux les plus fréquents. Côté culinaire, le premier Yennar (12 janvier au soir), on déguste elfef,  une sauce très épaisse à base de semoule et de dattes écrasées.
Les enfants se font couper les cheveux et recevront leur première pièce de monnaie. Le meilleur est pour le soir, quand grand-mère regroupe les enfants autour de l’âtre pour leur raconter encore une fois l’histoire de ce cavalier brave comme personne l’a jamais été. Une date qui a fait face à l’oubli, mais qui cherche encore une reconnaissance parmi les siens. Jusqu’à aujourd’hui, l’an 2961, toutes les demandes pour officialiser ce jour comme fête nationale sont restées lettre morte. Bonne Année !

 
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ddk
 
Yennayer au pays du cèdre, plus qu'une culture...
 
 
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Les Aurès et leur attachement ancestral à la célébration de Yennayer

 

Dans les villages et dechras reculés de la wilaya de Batna, les populations, les femmes tout particulièrement, restent fermement attachées à la célébration de Yennayer, nouvel an amazigh, en signe de fidélité aux traditions héritées de leurs aïeux, depuis des temps immémoriaux. A Mérouana, Arris, Theniet El Abed, Menaâ et bien d'autres localités, les auréssiennes replongent avec plaisir, en cette période de l'année, dans les pratiques reçues de leurs mères et grand-mères, comme la préparation du traditionnel plat de "chekhchoukha" garni de viande ovine. Ce mets, succulent au demeurant, sera consommé exclusivement par les femmes, ce qui confère toute sa particularité à cette coutume chaouie. Certaines femmes préparent également, pour la circonstance, le plat de ''cherchem" (appelé, ici, "icherchem") confectionné à base de blé dur, bouilli d'abord dans de l'eau puis mélangé à du beurre de ferme et à du miel de montagne, au plus grand plaisir des papilles des amateurs de pâtisseries traditionnelle dont la qualité "bio" est avérée.
Une autre pratique attachée au cérémonial du nouvel an berbère, consiste pour les ménagères à remplacer certains ustensiles par de la vaisselle neuve en terre cuite. Les pierres du feu de la maison, appelées "m'nasab", au nombre de trois, sont également changées et de nouveaux tapis et couvertures sont tissés pour la circonstance, tandis que l'intérieur de la demeure est badigeonné pour accueillir le nouvel an dans la gaieté et souhaiter qu'il soit de bon augure.  Durant la nuit du nouvel an, les ménagères prennent aussi soin de préparer des plats copieux en quantités suffisantes pour tous les membres de la famille et même pour d'inattendus invités, en signe de "baraka" et pour que l'année que l'on s'apprête à accueillir soit une année gorgée de bonheur. Gare toutefois à la femme qui "ose" prêter un quelconque objet de ménage durant la fête de Yennayer, car ce serait-là le présage d'une année de disette et de pauvreté pour sa famille. L'esprit d'entraide est ancré dans chaque famille aurésienne, c'est-là une évidence, mais "pas touche à mes ustensiles" dans le sillage du nouvel an!. Une autre tradition encore très vivace dans la région des Aurès est la réunion des femmes de la famille chez l'une d'entre elles pour parer une petite fille de ses plus beaux atours, la couvrir de bijoux et l'emmener visiter les proches. Pour Mohamed Merdaci, chercheur spécialisé dans le patrimoine amazigh national, il s'agit de "souligner le respect" que l'on doit manifester aux liens de parenté qui font la force de la société amazighe.  Le jeu "thi achan" (ou thaâchounet) qui voit les enfants prendre le rôle des parents est également encouragé par les chefs de famille, soucieux d'inculquer le sens de la responsabilité à leur progéniture. Au premier matin de la nouvelle année, les ménagères frottent des herbes vertes sur les bouches des outres avant de les remplir d'eau, en présage d'une saison agricole féconde.
Une autre habitude veut que durant la même matinée on renverse une pierre en granit, que l'on appelle "tichakkifine", afin d'interpréter ce que l'on trouve en-dessous. Si c'est une colonie de fourmis, ce sera le signe d'une reproduction abondante du bétail, si "l'on tombe sur de plus gros insectes, c'est qu'on va devenir propriétaire d'un troupeau de bovins", si c'est un trou que cachait "tichekkifine" cela voudrait dire que l'on obtiendra une récolte si profuse qu'on aura à prévoir plusieurs "matmours" (système de stockage souterrain des céréales) pour la conserver. Des traditions pouvant paraître ingénues, qui font sans doute sourire aujourd'hui, mais qui disent toute la richesse et la diversité du patrimoine authentique de l'Algérie profonde.

 

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